« BRUMOSO »
D’une vision rétrospective, j’ai voulu créer un climat dramatique du paysage vénitien, comme une évocation poétique… cette part d’infini que l’on porte en soi comme un destin.
L’émergence de nouvelles formes que la gravure permet fait surgir une « intemporalité » dans un dialogue avec l’invisible…
Entre eau-forte et grains, de nouvelles perceptions de la Cité liquide et solide vont transmettre la puissance des sillons mouvementés et profonds du Grand Canal. Elles expriment les humeurs et la variation des éléments naturels de la ville brumeuse et lumineuse.
Tout en évitant les structures linéaires, les contrastes entre les touches sombres des premiers plans et les formes évanescentes qui se profilent au fond, mes « Venises Hors des Eaux » se sont manifestées en profondeur, entre visible et invisible, en corrélation à mes images oniriques.
Le paysage se répand dans les entailles directes, s’expose à la diversité des tonalités intérieures pour résonner jusqu’aux reliefs gaufrés des papiers.
Les teintes portent encore la trace de l’humidité de la cité ; elles sont les voix de l’ombre et du silence. Bleu de Prusse ou bleu cobalt, ocre jaune, gris de Payne vont être les dynamiques d’une Venise gravée, celle d’un imaginaire où la rêverie grisâtre s’estompe.
Par le trait, je veux refléter la taille douce des coupoles de la Basilique et entendre le son de ses clochers ébarbés. La pointe sèche suit les contours des toits, les creux deviennent des pleins d’intensité émotionnelle où l’esprit s’évade et le geste se libère. La Basilique, coiffée de dômes et de tourelles, vêtue de mosaïques ancestrales offre au signe d’apparaître pour inscrire sur le métal vernis ses écritures universelles.
En mémoire aux incrustations polychromes de marbre et de porphyre, les encres dans un point d’équilibre glissent sur la planche et l’impression émerge.
Basiliques intérieures…
D’une Venise initiatique…
Je scrute depuis le silence vénitien.